PARTIE 4
ROULER DE NUIT
Autres aspects de la prépa aux 24h Vélo du Mans |
Mieux vaut avoir expérimenté le roulage nocturne avant de tenter des 24h vélo, cela va de soi.
Rouler de nuit, j'ai adoré dès la première fois, à l'occasion d'une flêche pascale pour Pâques 2007 en Provence, avec mes copains de Gannat. Ensuite, les nuits blanches euphoriques sur le vélo se sont multipliées à l'occasion de certains des brevets qualifs pour le PBP 2007, le PBP 2007, le Raid Provence Extrême 2008, le Raid Extrême Vosgien 2008, ma diagonale Strasbourg-Paris 2009, les 24 heures du Mans Vélo 2009 et 2011. Sans parler des nuits avortées du RPE et de la RATA en 2009, deux évènements où j'avais sombré dans un sommeil commateux au milieu de la nuit, incapable d'aller plus avant. D'ailleurs depuis 2009, j'éprouve des difficultés à ne pas avoir sommeil sur le vélo lors de ces séances nocturnes devenues très rares ! Le manque de préparation ? L'avancée en âge ? Une récupération des efforts plus lente ? Je ne sais.
Ces 24 h du Mans solo 2012 seront un vrai test car je ne suis pas certaine de pouvoir aller au bout de ma nuit sans dormir. Sans parler de ma capacité à pédaler pendant 24 heures d'affilée ou presque, puisque les arrêts devront être limités en nombre et en temps si je veux réussir à aligner quelques centaines de kilomètres !! Mais de toute façon, c'est bien l'idée de voir ce qu'il va advenir qui m'intéresse avant tout - me préparer au mieux mais n'être sûre de rien !!
Il me fallait effectuer une séance d'entraînement en nocturne - prévue depuis mi-juin, je l'ai reportée à plusieurs reprises. Le dernier weekend de juillet, impossible de repousser davantage. Bizarrement, autant je ne me suis jamais posée de questions auparavant lorsque le moment venait de prendre mon vélo route la nuit et de rouler seule, à la seule lumière de mes éclairages vélo, autant je sens la chose nettement moins bien depuis cette année....peut-être que les accidents tragiques qui se sont produits sur les routes des brevets qualifs PBP 2011 ne sont pas étrangers à cette appréhension.
Pour cette séance nocturne incontournable, la solution a consisté à faire appel à André dans le rôle d'assistant en voiture ! Il a donc inauguré ses vacances par une première partie de nuit au volant, à rouler à 26 km/h derrière moi, sur les routes de l'Ain !! Pas fôlichon comme programme, faut bien l'admettre....y'a ben que l'amour qui peut faire accepter et digérer un truc pareil !
Au dernier moment, j'ai quelque peu remanié le plan initial de Nicole, qui prévoyait une bonne charge de travail répartie en 3 séances sur ce weekend des 28 et 29 juillet, pour un total de 18 heures sur le vélo. Afin d'adapter le programme vélo aux conditions météo (éviter les gros orages annoncés si possible), et de ne pas multiplier les aller-retour en voiture (faire la chasse au gaspi), nous avons convenu avec André que je rejoindrai Chenôve à vélo, ferai un arrêt conséquent là-bas, puis repartirai en sens inverse. Donc environ 8 heures de trajet diurne aller , puis 8 autres heures de trajet retour dont 4 heures nocturnes.
Routes de l'Ain : souvent un beau point de vue sur les collines du Beaujolais
Séance de 4 heures du samedi maintenue donc - l'occasion d'un A/R solo de Villefranche à Mâcon, via l'Ain et le Beaujolais (avec passage nostalgique à Saint Amour), quelques gouttes de pluie au programme et quelques échauffements en côtes pour les gambettes.
L'après-midi, récup devant la course en ligne des hommes aux JO et prépa de la logistique pour mon expédition solo du lendemain car c'était l'occasion à ne pas manquer de tester la boisson de l'effort (d'hab je bois eau ou lait de riz, mais il semble que ma récup musculaire est insuffisante), les barres qui vont bien, la consommation optimale de liquides et solides sur des tranches de 2 / 3 heures, la fréquence et durée des arrêts.
Routes de l'Ain : souvent entre les champs de maïs
Le lendemain, dimanche 29 juillet, à 9h30 du mat départ de Villefranche pour Dijon - j'avais tracé un itinéraire via la Bresse bourguignonne sur Garmin Connect d'environ 185 bornes, à faire à l'aller puis au retour.
Mon itinéraire aller et retour
Y'avait plus qu'à pédaler, en veillant à rester à une cadence relativement élevée (pour moi, du moins.....c'est un des aspects sur lesquels il me faut beaucoup progresser : la capacité à garder une cadence de pédalage supérieure à 90 tpm longtemps) et en visant ma zone cardiaque cible pour les 24 heures (partie haute de ma zone tempo). Autres impératifs : boire et manger à intervalles réguliers, prévenir les courbatures par une position relâchée et des étirements sur le vélo, et mettre le bouton de ma radio intérieure sur la position 'Que du plaisir'. Ce dernier point fut facile, la météo était parfaite, vent ouest de côté, parfois de face ou de dos mais jamais longtemps, peu de voitures sur le trajet suivi, et surtout les jambes répondaient bien malgré des quadris un rien tendus !
Après, il m'a suffi de me laisser porter par la route et les heures. En chemin, deux arrêts flash de 6 mn chacun, mais aussi quelques détours et recherches d'itinéraire praticable dûs aux élucubrations de Garmin Connect !! Arrivée comme prévue chez André à Chenôve à 17h20, j'en suis repartie à 18h00 - temps d'arrêt relativement long car il a fallu recharger le Garmin, dont les batteries étaient plus à plat que les miennes !! André m'avait préparé un bon ravito et je reconstituais rapidement les stocks. Tandis qu'il équipait mon Colnago des lampes de rigueur pour la nuit, je procédais à quelques ablutions et me relaxais tout en savourant la victoire de Marianne Vos, sous une pluie londonnienne diluvienne, à la course en ligne des JO ! Quelle magnifique championne olympique !!
J'ai beaucoup apprécié de refaire le même trajet, en sens inverse. Déjà familier, mais pas tout à fait le même. En route, nouvel arrêt à Verdun-sur-le-Doubs, charmante bourgade connue pour la pochouse, soupe de poissons d'eau douce.
Coucher de soleil : je roulais en direction de Tronchy et n'ai pu résister à la tentation de prendre une photo
Puis les heures délicieuses du couchant sur les routes de la Bresse bourguignonne bordées par les couleurs vives des fermettes bressannes, plus belles encore que sur les pages glacées des magasines de maison et décoration. Gilet fluo enfilé, lampes allumées à St Etienne de Bresse, je n'ai eu à rouler seule dans la nuit qu'une heure car André, parti de Chenôve en voiture, les bagages des vacances dans le coffre, m'attendait dès 10h45 à Cuisery, exactement comme prévu.
Ensuite, ce fut un voyage grand luxe : éclairage par l'arrière ne laissant aucune part d'ombre, protection contre la circulation automobile plutôt dense à ma grande surprise jusqu'à ce que nous empruntions les petites routes cabossées et gravillonnées de la fin du trajet. Dernière heure que j'ai d'ailleurs effectuée à la volonté, sans aucun plaisir (plus aucune onde positive captée par ma radio intérieure !!), la nuque et les mains en piteux état, l'estomac en révolte et l'envie impossible à satisfaire de boire et manger d'abondance. La rançon à payer pour avoir mal géré mon absorption de liquides et solides, réduite à presque rien pendant 3 heures , depuis Cuisery. Mais c'est là une des difficultés de la vie cycliste nocturne : après 22h00, mon appareil digestif se met invariablement en mode sommeil - ce qui démontre que lui au moins n'est pas insensé ! Nous avons rallié la rue de la Liberté (beau nom, non ?) à 2 heures du matin, tout le monde dormait. Et nous n'avons pas tardé à faire de même !
Au total, 372 km parcourus, en 14h 08, à 26.3 km/h de moyenne, pour un dénivelé positif de 1950 m (ratio comparable à celui des 24 h du Mans), avec.plus de 7 heures passées dans la zone cardiaque cible, à une cadence moyennede 80 tpm (ce qui représente un progrès pour moi !). Côté temps d'arrêt : un peu plus de 2 heures, répartis en 5 arrêts rapides et deux longues pauses. Plus les errements liés à la recherche de mon itinéraire ou temps d'arrêt lors des traversées urbaines.
Enregistrement des données de cet entraînement sur Training Peaks.
Mes données de fréquence cardiaque pour les 12 premières heures de roulage : en plein dans la zone cible !
[Texte et photos : Pat]